BIENVENUE SUR LE BLOG DE "GRAND ANGLE"
La newsletter des élèves du MBA Audiovisuel de l'ESG

jeudi 15 juillet 2010

Interview de M. Ghislain Achard - Ancien DG de France TV, intervenant MPA


Ancien Directeur Général de FRANCE TELEVISION, Ghislain ACHARD cumule les casquettes et les activités autour du petit écran. Pourtant il parvient depuis plusieurs années à trouver le temps de venir partager son savoir et ses connaissances avec les élèves du MBA Production Audiovisuelle de l'ESG. Alors que le service public de l'audiovisuel connait de forts bouleversements, nous avons pu obtenir les observations d'un professionnel avisé.





Julie Miniussi : Quelles sont vos activités actuelles ?

Ghislain Achard : J’ai une société de Conseil « GAMMES » pour laquelle je travaille comme Consultant. Je réalise des études, des audits pour des groupes médias (radio, télévisions, etc) sur des aspects généraux d’organisation, de programmation et de gestion, et surtout des projets de développements (création de nouvelle chaîne, développement numérique, etc…).

Depuis peu, je suis également producteur. Nous avons beaucoup de projets en développement à destination des chaînes de télévision française. Nous essayons de nous positionner sur des sujets et des traitements qui sortent de l’ordinaire, un peu moins consensuels et un peu plus audacieux, ce qui à mon sens correspond à la demande actuelle.

Enfin, je fais partie du Comité stratégique et numérique, placé sous l’autorité du Premier Ministre. Nous coordonnons le passe de l’analogique vers le numérique. Nous supervisons également la question du « dividende numérique ».


J.M. : Nous vous connaissons au sein du MBA comme l’un des 4 instigateurs de la nouvelle chaîne de télé MCE – Ma Chaîne Etudiante MCE. Comment êtes-vous lancé dans ce projet ?

G. A : Comme souvent dans ce type de projet : c’est d’abord une rencontre de personnes, issue d’univers différents et complémentaires : F. Chalom et Ph. Marcoux qui sont des professionnels de la télévision, P. Azoulay, venu du monde de l’enseignement, et moi-même.

Nous avons identifié le besoin d’avoir un média spécifique sur le sujet souvent anxiogène pour les jeunes et pour leurs parents qui est celui de la formation et des choix d’orientation.

Naturellement ce fut difficile et long à mettre en route comme toujours pour ce type de projet. Il faut trouver les financements, constituer des équipes, avoir du stock de programme… L’audiovisuelle reste une industrie lourde et le processus est long. Pourtant, il est toujours très agréable d’être à l’origine d’un projet : ça laisse une liberté de création et d’organisation.


J.M : La taxe prévue pour remplacer la perte de revenus dû à la suppression de la publicité sur France Télévision à a été retoquée ; en tant qu’ancien DG du groupe FTV avez-vous à dire sur ce sujet ?

G. A : Je n’étais pas très favorable à la suppression de la publicité sur le Service Public de la télévision, qui constituait des recettes stables et propres. Le problème du remplacement de cette ressource est épineux. Bruxelles a effectivement retoqué la taxe prévue et dont on ne sait ce qu’elle va devenir. Pour pallier à cette perte de recettes, compter sur le seul budget de l’Etat est dangereux : celui-ci évolue chaque année en fonction de priorités différentes. Le courage d’imposer une redevance élevée et attribuée directement aux chaînes de télé et radio Comme en Angleterre ou en Allemagne me semble une idée de fonctionnement intéressante.


J.M : Pourquoi intervenir dans le MBA Production Audiovisuelle ?

G. A : Cela fait 3 ans que j’interviens dans le MBA de Production Audiovisuelle. J’aime avant tout transmettre mon expérience et ma connaissance du terrain, du monde de l’entreprise ; j’interviens d’ailleurs régulièrement dans différentes structures. J’aime particulièrement l’échange avec la jeune génération, la spontanéité des question impertinente.

En outre, cela nécessite une certaine introspection, d’analyser la manière dont on travaille et dont se pose dans le monde professionnel. On apprend aussi beaucoup sur soi-même.

Ce MBA est très intéressant en complément d’un cursus général. Si une base généraliste est essentielle ce secteur demande aussi des compétences qui lui sont propres. Cette formation permet de les acquérir. Il est important d’avoir des bases solides dans ce genre de métiers assez généralistes.


J.M : Le secteur télévisuel connaît de profonds bouleversements (nouveaux medias, nouveaux modes de consommation...) Quelle est votre opinion sur cette évolution du secteur audiovisuel que l’on observe actuellement ?

Effectivement nous sommes dans un virage mais faut tempérer cette évolution puisque les chiffres tendent à le prouver : la télévision reste LE média classique. Et par ses ressources il reste le seul média capable d’offrir des contenus de ce type. Les programmes télé restent chers à faire (plateau, re portages, rédaction, etc…). Par exemple, avec MCE, si nous avions fait une WebTV, nous n’aurions jamais pu financer les programmes que nous proposons.

Ce qui est un peu inquiétant c’est l’effritement de l’audience : il se crée beaucoup de petite chaînes, mais dont aucune n’a les moyens de produire des programmes coûteux comme des fictions. Toute la difficulté est là : comment maintenir un bon niveau de création s’il n’y pas de moyens sérieux pour financer ?

Pour l’instant, si la consommation se modifie mais le modèle économique reste le même. La question est pour combien de temps ? C’est une question difficile.


Propos recueillis par Julie MINIUSSI, MPA Promo 2010